livre 6: SORTIE !!!!!!!!

« On peut apprendre de nouveaux mots, Artemis ? » demanda Myles, qui voulait retourner à un pot de terreau dans sa chambre. « Je fais des " ‘spériences" avec le Professeur Primate. »

Professeur Primate était un singe en peluche, et occasionnellement le partenaire de laboratoire de Myles. L'animal en peluche avait passé la plupart de son temps dans un bécher de verre de borosilicate sur la table de " 'spériences". Artemis avait reprogrammé la boite vocale du singe pour correspondre à la voix de Myles avec douze phrases, incluant « C’est vivant ! C’est vivant ! » et « L’Histoire se rappellera de ce jour, Professeur Myles. »

« Tu pourras bientôt retourner dans ton laboratoire, » dit Artemis en approuvant. Myles avait été taillé dans le même tissu que lui, un scientifique né. « Maintenant, les garçons, j'ai pensé qu’ aujourd'hui nous pourrions aborder quelques termes de restaurant. »

« Les éternuements ressemblent aux vers, » dit Beckett, qui ne restait jamais sur le même sujet.

Artemis avait presque été jeté par cette remarque. Les vers n’étaient certainement pas au menu, bien que les escargots en soient. « Oublie les vers. »

« Oublie les vers ? » dit Beckett, horrifié.

« Juste pour le moment, » assura Artemis. « Dès que nous aurons terminé notre jeu de mots, vous pourrez penser à ce qu’il vous plaît. Et si vous êtes vraiment sages, je vous emmènerais pour voir les chevaux. »

L’équitation était la seule forme d’exercices que faisait Artemis. C’était essentiellement parce que le cheval faisait le plus gros du travail.

Beckett s’est montré du doigt. « Beckett, » dit-il fièrement, les vers étant déjà un lointain souvenir.

Myles soupira. « Simple-toon*. »



Artemis commençait à regretter la planification de cette leçon, mais ayant commencé, il était déterminé à aller de l’avant.

« Myles, n’appelle pas ton frère ‘nigaud’*. »

« C’est bon, Artemis. Il aime ça. Tu est un simple-toon*, n’est-ce pas, Beckett ? »




*En anglais, ‘nigaud’ se dit ‘simpleton’. Myles et Beckett déforme le mot en disant ‘simple-toon’. Impossible de traduire ça en français. x)

Le Pr Primate est un singe bourré! si si jvous jure! (ou farci)
Artemis a des cheveux... oui bon ben jme suis trompée d'une lettre, je voulais mettre chevaux...

« Beckett simple-toon, » approuva joyeusement le petit garçon.

Artemis frotta ses mains ensemble. « Bien, frères. En avant. Imaginez-vous assis à la table d’un café de Montmartre. »

« Dans Paris, » dit Myles, d'un air suffisant redressant la cravate qu'il avait emprunté à son père.

« Oui, Paris. Et tels que vous êtes, vous ne pourrez pas attirer l’attention du serveur. Que faites-vous ? »

Les enfants le regardaient avec des yeux vides et Artemis commença à se demander s’il n’avait pas placé la leçon un peu haut. Il a été soulagé, et un peu surpris, de voir une étincelle de compréhension dans les yeux de Beckett.

« Hummm… Dire à Butler de sauter-sauter-sauter sur sa tête ? »

Myles était impressionné. « Je suis d’accord avec le simple-toon. »

« Non ! » répondit Artemis. « Vous lever simplement un doigt en disant clairement « Ici, garçon.* » »

« Itchy quoi ? »

« Quoi ? Non, Beckett, pas itchy. » soupira Artemis. C’était impossible. Impossible. Et il n’avait pas encore présenté les cartes flash ou son nouveau pointeur laser modifié, qui pourrait mettre en évidence un mot ou quelqu'un par le biais de plusieurs plaques d'acier, selon le cadre.

« Essayons tous ensemble. Levez un doigt et dites « Ici, garçon. »

Les petits garçons firent comme on le leur avaient dit, désireux de faire plaisir à leur frère dérangé.

« Ici, garçon. » dirent-ils en cœur, leurs doigts rondelets levés. Puis, du coin de sa bouche, Myles chuchota à son jumeau, « Artemis simple-toon. »

Artemis leva les mains. « Je me rends. Vous avez gagné, je me rends. Pourquoi ne pas peindre plusieurs images ? »

« Excellent, » répondit Myles. « Je vais montrer la peinture à mon pot de terre. »



*Les paroles en italique sont en français dans le texte d’origine.

Beckett était septique. « Je n’apprendrais rien ? »

« Non, » dit Artemis, ébouriffant affectueusement les cheveux de son frère et le regretta immédiatement. « Tu n’apprendras pas certaines choses. »

« Bien, Beckett heureux, maintenant. Tu vois ? » Le garçon se montra du doigt une fois de plus, spécifiquement le large sourire sur son visage.

Les trois frère étaient allongés sur le sol, les coudes sur leurs affiches de peinture, quand leur père entra dans la chambre. Il semblait fatigué de ses fonctions d’infirmier, mais aussi digne et fort, se déplaçant comme un athlète de toute une vie, malgré sa jambe artificielle bio-hybride. La jambe utilisait l’os, des prothèses en titane, et des capteurs de signaux cérébraux
pour permettre à Artemis Senior de se déplacer. Parfois, à la fin de la journée, il devrait utiliser une poche de gel pour atténuer sa rigidité, mais sinon, il se comportait comme si cette nouvelle jambe était la sienne.

Artemis se mit sur ses genoux, de la peinture tombant goutte à goutte de ses mains.

« J’ai abandonné le vocabulaire Français et rejoins les jumeaux dans un jeu. » Il sourit et essuya ses mains. « Il est tout à fait libérateur, en réalité. Nous nous sommes peint les doigts à la place. J'ai essayé de glisser dans une petite conférence sur le cubisme, mais j’ai reçu un éclaboussement pour les troubles que j’ai causés.

Artemis remarqua que son père n’était pas simplement fatigué. Il était aussi anxieux.

Il s’éloigna des jumeaux et marcha avec Artemis Senior pour parler au fond de la bibliothèque.

« Quel est le problème ? La grippe de Mère s’aggrave ? »

Le père d’Artemis s’arrêta, une main sur l’échelle roulante, et enleva son poids de la prothèse. Son expression était étrange, une qu’Artemis ne se souvenait pas d’avoir déjà vu.

Il réalisa que son père était plus qu’anxieux. Artemis Fowl Senior était effrayé.

« Père ? »

Artemis Senior saisi le barreau de l’échelle avec une telle force que le bois craqua. Il ouvrit la bouche pour parler, mais sembla changer d’avis.

Maintenant Artemis lui-même était devenu inquiet. « Père vous devez me dire ».

« Bien sûr », commença son père, comme s’il venait de se rappeler de ou il était. « Je dois te le dire… »

Une larme tomba de ses yeux, tombant sur sa chemise, et approfondissant le bleu de celle ci.

« Je me rappelle la première fois que j’ai vu ta mère » dit-il. « J’était dans une soirée privée dans The Ivy. Une pièce pleine de canailles et j'étais le plus grand de tous. Elle m'a changé Arty. Mon cœur était cassé puis il c’est à nouveau réunit. Angeline a sauvé ma vie. Maintenant...»

Artemis se senti faible avec ces nerfs. Son sang martela contre ses oreilles comme le surf sur l’Atlantique.

« Père, mère est-elle entrain de mourir ? Est-ce cela ce que vous essayez de me dire ? »

L'idée sembla risible. Impossible.

Son père trembla, comme si on venait de le tirer d’un rêve.

« Pas si les hommes Fowl ont quelque chose à en dire, n’es-ce pas fils ?
Il est temps pour toi de gagner cette réputation qui t’es donné».

Les yeux d'Artémis Senior étaient brillants de désespoir.

« Ce que nous devons toujours faire, fils. Ce qu’il faut. »

Artémis senti la panique monter à l'intérieur de lui.

« Ce que nous devons toujours faire ? »

*Sois calme… tu a le pouvoir d’arrêter le temps non ??? *a-t-il pensé

Artémis n'avait pas encore tous les faits, néanmoins il était raisonnablement confiant qu'indépendamment d'avoir mentit à sa mère celle-ci pourrait être guérie avec un éclat de magie. Et il était le seul homme sur la Terre avec cette magie passant en continue dans son système.

« Père », dit-il, « le docteur est-il parti ? »

Sur le coup la question a semblé rendre perplexe Artémis Senior, alors il s'est souvenu. « Quoi ? Non il est dans le hall. J'ai pensé que tu pourrais lui parler. À tout hasard, s'il y a une question que je peux avoir manquée... »

Artemis fut à moitié surpris de trouver le Dr. Hans Schalke, le leader européen sur les maladies rares, dans le hall, et non le médecin de famille habituel. Naturellement, son père avait fait venir Schalke quand la santé d’Angeline Fowl s’est détériorée. Schalke attendait sous le filigrane des Fowl, un sac Gladstone en peau dure près de ses chevilles, comme un scarabée géant. Il portait un imperméable gris et parlait à son assistant avec une voix forte.

Tout chez le médecin était fort, du haut de son crâne à ses pommettes et son nez. (note du traducteur : j’ai pas réussi à rendre correctement l’idée…). Ses lunettes grossissaient les yeux bleus de Schalke, et sa bouche était réduite à gauche et à droite, bougeant à peine lorsqu’il parlait.

« Tous les symptômes, » dit-il, avec son accent Allemand. « Sur toutes les bases de données, vous comprenez ? »

Son assistante, une jeune fille dans un costume coupé coûteux, acquiesça de la tête plusieurs fois, inscrivit des instructions sur l’écran de son smartphone.

« Les universités aussi ? » demanda-t-elle.

« Toutes, » répondit Schalke, accompagnant le mot d’un signe de tête impatient. « N’ai-je pas dit toutes ? Ne comprenez-vous pas mon accent ? Est-ce parce que je viens d’Allemagne ? »

« Désolée, Docteur, » dit contritement l’assistante. « Toutes, bien sûr. »

Artemis s’approcha du Dr. Schalke, la main tendue. Le médecin ne retourna pas le geste.

« Contamination, Maître Fowl, » dit-il, sans trace d’excuses ou de sympathie. « Nous ne savons pas encore si votre mère est contagieuse. »

Artemis referma sa main, la glissant derrière son dos.

« Nous ne nous sommes jamais rencontrés, Docteur. Pourriez-vous me décrire les symptômes de ma mère ? »

Le médecin était exaspéré, irrité. « Très bien, jeune homme, mais je ne suis pas habitué à traiter avec des enfants, ce ne sera donc pas édulcoré. »

Artemis dégluti, la gorge soudainement sèche.

Edulcoré.

« L’état de votre mère est peut-être unique, » ajouta Schalke, bannissant son assistante dans son travail avec un claquement de doigts. « Ce que je peux dire, c’est que ses organes d’abîment. »

« Quels organes ? »

« Tous, » répondit Schalke. « J’ai besoin d’apporter l’équipement de mon laboratoire du Trinity College. Evidemment, votre mère ne peut pas bouger. Mon assistante, Imogen, Miss Book, la surveillera jusqu’à mon retour. Miss Book n’est pas seulement mon journaliste mais aussi une excellente infirmière. Une combinaison utile, non ? »

Dans sa vision périphérique, Artemis vu Miss Book se précipiter au détour d’un coin, en balbutiant dans son smartphone. Il espéra que la journaliste/infirmière donnerait plus d’informations quand elle soignera sa mère.

« Je suppose. Tous les organes de ma mère ? Tous ? »

Schalke ne semblait pas enclin à se répéter. « Ca me rappelle le lupus, mais plus agressif, combiné avec les trois étapes de la maladie de Lyme. J’ai déjà observé une tribu Amazonienne avec des symptômes similaires, mais pas aussi sévères. Au taux de déclin, votre mère n’a que quelques jours. Franchement, je doute que nous ayons le temps de finir les tests. Nous avons besoin d’un remède miracle, et selon ma considérable expérience, les remèdes miracles n’existe pas. »

« Peut-être existent-ils, » dit Artemis, absent.

Schalke pris son sac. « Mettez votre foi dans la science, jeune homme, » conseilla le médecin. « La science servira votre mère mieux que n’importe quelle force mystérieuse. »

Artemis tint la porte pour Schalke, le regardant faire la douzaine de pas jusqu’à sa Mercedes Benz vintage. La voiture était grise, comme les nuages au-dessus d’eux.

Il n’y a pas de temps pour la science, pensa l’adolescent Irlandais. La magie est mon unique option.

Quand Artemis retourna à ses études, son père était assis sur le tapis avec Beckett collé à son torse, comme un singe.

Butler est balourd... si si jvous jure x) ou alors les synonymes: lourd, lourdau, bete, sot, maladroit grossier

et Sara à appris 3 mots d'anglais: I am back. elle fait des progrès x)]

« Puis-je voir Mère maintenant ? » lui demanda Artemis.
« Oui » Répondit Artemis Senior. « Vas-y et vois ce que tu peux trouver. Etudie ses symptômes pour tes recherches. »

Mes recherches ? Pensa Artemis. Des moments difficiles nous attendent.



L’imposant garde du corps d’Artemis, Butler, l’attendait aux pieds des escaliers, entièrement recouvert d’une armure Kendo, la visière du casque rabattue laissant voir ses traits burinés.

« J’étais dans le donjon, m’entrainant avec l’hologramme, il expliqua. Ton Père a appelé et m’a dit qu’il avait besoin de moi immédiatement. Qu’est-ce qui se passe ? »
« C’est Mère, répondit Artemis en le dépassant. Elle est très malade. Je vais voir ce que je peux faire pour elle. »

Bluter se précipita pour le rattraper, l’armure cliquetant sur sa poitrine.

« Fait attention Artemis. La magie n’est pas la même chose que la science. Tu ne peux pas la contrôler. Tu ne voudrais pas accidentellement faire empirer l’état de Mrs Fowl ? »

Artemis arriva en haut du grand escalier, ses mains hésitantes en direction de la poignée en laiton de la porte de la chambre, comme si elles étaient aimantées.

« J’ai bien peur que son état ne puisse pas être pire… »

Artemis rentra à l’intérieur seul, laissant le garde du corps détacher le casque de l’armure Kendo et le plastron Hon-nuri. Il portait en-dessous un survêtement à la place du traditionnel pantalon long. De la transpiration ruisselait le long de son torse et de son dos, mais Butler ignora son désir d’aller prendre une douche, se tenant en sentinelle devant la porte, sachant qu’il ne devrait pas faire beaucoup d’efforts pour écouter ce qui se passait à l’intérieur, mais espérant qu’il ne le pourrait pas.

Butler était le seul autre humain qui connaissait l’entière vérité sur les frasques magiques d’Artemis. Il avait été aux cotés de son jeune maitre au cours de leurs différentes aventures, se battant contre les fées et les humains à travers les continents. Mais Artemis avait fait le voyage à travers le temps jusqu’aux Limbes sans lui, et il en était revenu changé. Une partie de son protégé était magique à présent, et pas simplement l’œil noisette gauche du Capitaine Holly Short, que le flot temporel lui avait donné en remplacement du sien. Sur le trajet depuis la Terre jusqu’aux Limbes et son retour, Artemis avait en quelque sorte réussi à voler quelques traces de magie des fées, dont les atomes avaient été mélangés avec les siens au cours du flot temporel. Quand il était rentré chez lui depuis les Limbes, Artemis avait suggéré à ses parents, par l’indiscutable mesmer, tout simplement de ne pas penser à où il avait bien pu disparaitre au cours de ces dernières années. Ce n’était pas un plan très sophistiqué, étant donné que sa disparition avait fait la une des journaux dans le monde entier, et que ce sujet avait été répandu à la manière dont les Fowls l’avaient espéré. Mais jusqu’à ce qu’Artemis puisse mettre la main sur un effaceur de mémoire des FAR, ou bien sûr développer le sien, cela devrait suffire. Il suggéra à ses parents que si quelqu’un venait à poser des questions sur lui, ils répondent simplement qu’il s’agissait d’affaires familiales, et exigent que leur vie privée soit respectée.

Artemis est un humain magique, songea Butler. Le seul.

Et maintenant Butler venait juste d’apprendre qu’Artemis se préparait à utiliser cette magie dans le but de soigner sa mère. C’était un jeu dangereux ; la magie ne faisait pas partie intégrante de sa constitution. Le garçon pouvait très bien effacer certains symptômes pour les remplacer par d’autres.



Artemis entra dans la chambre de ses parents doucement. Les jumeaux galopaient ici à toutes les heures du jour et de la nuit, se jetant sur le lit à baldaquin pour se batailler avec sa mère et son père qui protestaient, mais Artemis n’avait jamais expérimenté cela. Son enfance avait été plongée dans l’ordre et la discipline.

Frappe toujours avant d’entrer, Artemis, son Père lui avait apprit. Cela montre le respect.

Mais on père avait changé. Avoir frôlé la mort sept ans plus tôt lui avait montré ce qui était vraiment important. Maintenant il était toujours prêt à serrer dans ses bras et rouler dans les draps avec ses enfants adorés.

Trop tard pour moi, songea Artemis. Je suis trop vieux pour les empoignades avec Père.

Mère était différente. Elle n’avait jamais été froide, si l’on excluait ses moments de dépression lorsque son père avait été porté disparu. Mais la magie des fées et le retour de son très cher mari l’avait sauvée de tout cela et elle était redevenu elle-même de nouveau. Ou l’était jusqu’à maintenant.

Artemis traversa la pièce à pas lents, effrayé de ce qui s’étendait devant lui. Il marcha précautionneusement sur le tapis, faisant attention en passant à travers les motifs de vigne tissés.

Pieds sur une vigne, compte jusqu’à dix. *

C’était une habitude depuis qu’il était petit, une vieille superstition que lui avait murmuré son père. Artemis ne l’avait jamais oublié et comptait toujours jusqu’à dix* pour disperser la malchance même si seulement un orteil effleurait la vigne sur le tapis.

Le lit à baldaquin reposait au coin de la chambre, enveloppé par les rideaux et la lumière du Soleil. Une brise se glissa dans la chambre, faisant onduler les rideaux de soie comme la voilure d’un bateau pirate.

Une des mains de sa mère se balançait sur le côté. Pale et osseuse.

Artemis était horrifié. Hier à peine sa mère allait bien. Un nez un peu enrhumé, mais toujours riante et bien portante.

« Mère » éclata-t-il en voyant son visage, comme si le monde venait de lui asséner un violent coup de poing.

C’était impossible. En vingt-quatre heures, sa mère était presque devenue un squelette. Ses pommettes tranchantes comme des silex, ses yeux perdus dans ses orbites noirs.

Ne t’en fait pas, se dit Artemis. Dans quelques petites secondes Mère sera guérie et je pourrais enquêter sur ce qui s’est passé ici.

Les beaux cheveux d’Angeline Fowl étaient hirsutes et cassant, étendus en filaments brisés sur son oreiller comme une toile d’araignée. Et une odeur étrange s’échappait de ses pores.

Du lys, pensa Artemis. Sucré et teinté par la maladie.

Les yeux d’Angeline s’ouvrirent brutalement dans un mouvement de panique. Son dos s’arc-bouta, tandis qu’elle cherchait de l’air à travers sa trachée comprimée, agrippant l’air de ses mains serrées. Alors même qu’elle s’effondrait soudainement, Artemis pensa pendant un terrible instant qu’elle était partie.

Mais ensuite elle battit des paupières et leva une main vers lui.


*Dans la version originale : step on a vigne, count to nine , qui signifie compter jusqu’à neuf et non pas à dix. Mais les rimes étant difficiles à rendre dans la version française, il parait peut-être plus judicieux de changer le chiffre pour avoir au moins une assonance en « i ».

« Arty, dit-elle, sa voix aussi faible qu’un murmure. Je suis en train d’avoir le rêve le plus étrange... »

Une phrase courte, mais qui prit une éternité pour se finir, un râle entre chaque mot.
Artemis prit la main de sa mère. Comme elle était mince. Un paquet d’os.

« Ou peut-être que je suis réveillée et que mon autre vie est un rêve… »

Artemis était peiné d’entendre sa mère parler ainsi ; cela lui rappelait les changements d’attitudes dont elle avait déjà été affectée.

« Vous êtes réveillée, Mère, et je suis là. Vous avez une légère fièvre et êtes un peu déshydratée, c’est tout. Rien dont on doit vraiment s’inquiéter. »

« Comment puis-je être réveillée, Arty, répondit Angeline, ses yeux cernés de noir, quand je sens que je suis en train de mourir ? Comment puis-je être réveillée quand je sens cela ? »

Le calme feint d’Artemis venait d’en prendre un coup.

« C’…C’est la fièvre, il balbutia. Vous voyez les choses de manière un peu étrange. Tout va s’arranger rapidement. Je le promets. »

Angeline ferma ses yeux.

« Et mon garçon tient ses promesses, je sais. Ou étais-tu passé, ces trois dernières années, Arty ? Nous nous sommes tellement inquiétés. Pourquoi n’as-tu pas dix-sept ans ? »

Dans son délire, Angeline voyait à travers le brouillard de la magie la vérité. Elle réalisait qu’il avait été absent pendant trois ans et était revenu au même âge que lorsqu’il était parti.

« J’ai quatorze ans, Mère. Presque quinze maintenant, encore un garçon pendant quelques temps encore. Maintenant fermez vos yeux, et quand vous les rouvrirez de nouveaux tout ira pour le mieux.
- Qu’est ce que tu a fait à mes pensées, Artemis ? D’où est-ce que tu tiens ton pouvoir ? »

Artemis transpirait à présent. La chaleur de la chambre, l’odeur douceâtre de la maladie, sa propre anxiété.

Elle sait. Mère sait. Si tu la guérie, est-ce qu’elle se souviendra de tout ?

Ca n’avait pas d’importance. Il pourrait s’en occuper plus tard. Sa priorité était de la soigner.
Artemis serra fermement la main frêle, sentant les articulations grincer les unes contre les autres. Il était sur le point d’utiliser la magie sur sa mère pour la seconde fois.

La magie n’appartenait pas à l’âme d’Artemis, et lui produisait des maux de tête foudroyants à chaque fois qu’il l’utilisait. Même s’il était humain, les règles des fées concernant la magie avaient une certaine influence sur lui. Il était forcé de prendre des cachets contre le mal des transports, en entrant dans une demeure dont il n’était pas invité, et à la pleine lune, on pouvait souvent trouver Artemis dans la bibliothèque, écoutant la musique au volume maximal pour faire taire les voix dans sa tête. Le grand rassemblement des créatures magiques. Les pensées des fées fusaient puissamment, et celles-ci refaisaient surface en vague d’émotions vives, apportant avec elles les migraines.

Parfois Artemis se demandait si le fait d’avoir voler de la magie n’avait pas été une erreur, mais récemment les symptomes avaient cessé. Plus de migraines ou de nausées désormais. Peut-être que son cerveau s’était adapté à son nouvel état de créature magique.
Artemis tint les doigts de sa mère doucement, ferma les yeux et fit le vide dans son esprit.

La magie. Seulement la magie.

La magie avait une force sauvage qui avait besoin d’être maitrisée. Si Artemis laissait vaquer ses pensées, la magie vaquerait aussi, et il pourrait ouvrir les yeux pour trouver sa mère toujours malade mais avec une couleur de cheveux différente.

Guérie, pensa-t-il. Porte-toi bien Mère.

La magie répondit à son souhait, se répandant le long de ses membres, bourdonnant et tintant. Des étincelles bleues encerclèrent ses poignets, tressautant comme des bancs de petits vairons*. Presque comme si elles étaient vivantes.

Artemis pensa à sa mère dans des temps meilleurs. Il voyait sa peau radieuse, ses yeux brillants de joie. Entendait son rire, son contact sur son cou. Se rappelait la force de l’amour qu’éprouvait Angeline Fowl pour sa famille.

C’est cela que je veux.

Les étincelles entendirent ses prières et reflouèrent vers Angeline Fowl, se coulant dans la peau de sa main et de son poignet, l’enroulant comme des cordages le long de son bras décharné. Artemis se concentra encore et une rivière d’étincelles magiques s’écoula de ses doigts en direction de sa mère.

Guérie, pensa-t-il. Débarrasse-toi de la maladie.

Artemis avait déjà utilisé cette forme de magie auparavant, mais cette fois quelque chose était différent. Il y avait une résistance, comme si le corps de sa mère ne désirait pas être soigné et rejetait le pouvoir. Les étincelles tombèrent sur sa peau, et disparurent dans un spasme.

Plus, songea Artemis. Plus.

Il se concentra davantage, en ignorant le soudain mal de tête aveuglant et la nausée qui s’avançait en grondant.

Guérie, Mère.

La magie enveloppa sa mère comme une momie égyptienne, rampant sous son corps, l’élevant de quinze centimètres au dessus du matelas. Elle frissonna et gémit, de la sueur s’échappant de ses pores, grésillant alors qu’elle rentrait en contact avec les étincelles bleues.

Elle souffre, pensa Artemis, entrouvrant légèrement un œil. Elle agonise. Mais je ne peux pas m’arrêter maintenant.

Artemis creusa profondément, cherchant dans ses réserves pour les dernières bribes de magie qui lui restaient.

Tout. Donne-lui la dernière étincelle.

La magie ne faisait pas partie intrinsèque d’Artemis ; il l’avait volé et maintenant il la renvoyait, donnant tout ce qui lui restait dans sa tentative de guérison. Et cela ne marchait toujours pas. Non, pire. La maladie devenait plus forte. Repoussant chaque vague bleue, enlevant aux étincelles leur couleur et leur pouvoir, les envoyant ricocher contre le plafond.

Quelque chose ne va pas, songea Artemis, de la bile remontant dans sa gorge, une douleur poignante au dessus de son œil gauche. Cela ne devrait pas se passer comme ça.

La dernière goutte de magie quitta son corps dans un sursaut, et Artemis fut jeté du chevet de sa mère et envoyé en dérapant sur le sol, dégringolant sans-dessus-dessous, avant de pouvoir s’étendre contre une chaise longue. Angeline eut un dernier spasme, puis s’évanouit de nouveau sur son matelas. Son corps macérait dans un gel épais et clair.
Les étincelles magiques clignotèrent et moururent dans cet enrobage, qui fut soufflé aussi rapidement qu’il était apparu.

Artemis était étendu, sa tête entre ses mains, attendant que le chaos dans son esprit ne s’arrête, incapable de bouger ou penser. Sa propre respiration semblait se répercuter à l’intérieur de son crâne. Finalement, la douleur laissa place à de légers échos, et les mots embrouillés formèrent de nouveau des phrases.

La magie est partie. Dépensée. Je suis entièrement humain.

Artemis enregistra le craquement de la porte de la chambre, et ouvrit ses yeux pour trouver Butler et son père le fixant, l’inquiétude se lisant sur leur visage.

« Nous avons entendu un bruit de chute. Tu dois être tombé, dit Artemis Senior, en soulevant son fils par le coude. Je n’aurais jamais du te laisser entrer ici tout seul, mais j’ai pensé que tu aurais peut-être pu faire quelque chose. Tu as certains talents, je le sais bien. J’espérais… »

Il lissa la chemise de son fils et lui tapota les épaules.

« C’était stupide de ma part »

Artemis repoussa la main de son père, trébuchant jusqu’au chevet de sa mère. Il eut juste besoin d’un regard pour confirmer ce qu’il savait déjà. Il n’avait pas soigné sa mère. Ses joues n’avaient aucune couleur et sa respiration était difficile.

Son état a empiré. Qu’est-ce que j’ai fait ?

« Qu’est-ce c’est ?demanda son père. Mon dieu qu’est-ce qui ne va pas chez elle? Avec ce taux de déclin, dans moins d’une semaine mon Angeline sera… »

Butler l’interrompit brutalement.

« Ne renoncez pas maintenant, messieurs. Nous avons d’anciens contacts qui peuvent être capable apporter des éclairements sur la condition de Mrs Fowl. Des gens avec qui nous ne nous associerions pas si la situation était différente. Nous les trouvons et les ramenons ici aussi rapidement que nous le pouvons. Ne nous embarrassons pas de nuisances comme les passeports ou les visas et faisons cela. »

Artemis Senior acquiesa, doucement au début, puis ensuite avec plus de rigueur.

« Oui. Oui, au diable. Elle n’est pas encore finie. Mon Angeline est une combattante, n’est-ce pas chérie ? »

Il prit sa main délicatement, comme si elle était faite en cristal. Elle ne répondit pas à son contact ou à sa voix.

« Nous avons rencontré tous les patriciens en Europe à propos de mon amputation de la jambe. Peut-être que l’un d’entre eux pourra nous aider dans ce cas-là. »

« Je connais un homme en Chine, dit Butler. Il avait travaillé avec Madame Ko à l’académie des gardes du corps. Il faisait des miracles avec les herbes. Vivait dans les hautes montagnes. Il n’a jamis quitté la province, mais il viendrait pour moi. »

« Bien, dit Artemis Senior. Plus l’on aura d’opinions, mieux cela vaudra. »

Il se tourna vers son fils.

« Vois, Arty, si tu connais quelqu’un en mesure de nous aider. N'importe qui. Peut-être as-tu des contacts internationaux ?** »

Artemis fit tourner une bague un peu proéminente qu’il portait à son auriculaire, de façon à ce que le devant soit placé à l’intérieur de sa paume. La bague était en réalité un communicateur féérique camouflé.

« Oui, répondit-il. J’ai quelques contacts internationaux ** ».



FIN DU PREMIER CHAPITRE



*les vairons sont des petits poissons. Vu que je ne le savais pas autant partager cette information !^^


** Il y a ici un jeu de mot intraduisible en français.

Littéralement, le père d’Artemis lui demande s’il a des « underworld contact », « underworld » désignant la pègre.
Artemis répond au pied de la lettre : underworld = littéralement « sous le monde », « sous terre » , ce qui est effectivement le cas puisque les fées vivent en milieu souterrain !