Rencontre entre un fou et un génie

Finalement, je... enfin, nous, nous sommes mis d'accord sur la nécessité urgente d'aller voir un psychologue. Etant tous aussi feignants les uns que les autres, nous avons décidé que le plus proche était celui de St-Bartleby. Résultat, on attend tous les quinze devant une porte parmi tant d'autre dans un couloir désert en cet après-midi. Celui qui était juste avant nous s'appelle Artemis Fowl. Le petit génie de l'école...
La porte s'ouvre, il sort. Le psychologue referme la porte derrière lui, l'air épuisé. Je suis bon pour attendre.
Fowl, sans son garde du corps. Depuis quelques temps, monsieur Butler est obligé d'attendre dehors... Tant pis pour le garde du corps. On se lève pour lui serrer la main.

Salut. Axel Webb.Euh... oui. Axel Webb. Ça va ?

Aïe... Axel... C'était pas le moment Axel. Devait à mon tour... Oui Henry, je sais... Franchement, Charles, vivement que tu trouves quelque chose pour ça, et vite... Très vite même. Parce qu'on risque de finir par avoir des problèmes avec ça...
Que... son porte-monnaie, déjà dans ma poche. Tiens, et sa montre aussi. Décidément, on ne se refait pas... Heureusement que je les vide souvent.

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Exceptionnellement, Butler était resté devant la porte du bureau du psycologue. Ou plutot, devant la porte de la salle d'attente. Ca, c'avait été la volonté du psycologue. Artémis avait haussé les épaules. Si ça pouvait lui faire plaisir... En fait, Artémis pensait surtout qu'il avait peur de Butler (ce qui était tout à fait logique), et qu'il pensait pouvoir tenir tête à Artémis plus facilement sans la présence du garde du corps. Si ça l'amusait, de croire qu'il était si intelligent...
Artémis n'avait d'ailleurs pas tardé à lui démontrer que, garde du corps ou pas, l'un était toujours aussi démuni face aux arguments et aux réponses cinglantes de l'autre. Comme d'habitude, la conversation avait tourné en rond. A partir de sujets anodins, Artémis, par pur esprit de provocation, trouvait toujours le moyen de lancer un débat philosophique sur la question.

Bref. Quand Artémis sortit enfin du bureau du psycologue, il pensait déjà à son programme de la soirée. Le psy, lui, devait encore penser à cet épisode. D'ailleurs, Artémis avait réussi, comme lors de la plupart de leurs rendez-vous, à le mettre en colère, et à le fatiguer.
Aussi Artémis, perdu dans ses pensées, avait été un peu surpris d'entendre une voix près de lui.

Qui c'était ce type, qui n'était même pas sur de savoir comment il s'appelait ? Ou alors il était en train de le prendre pour un abruti, ou il en était vraiment un (Charles, je veux dire^^). Un amnésique ? Peu probable. En même temps, s'il attendait pour voir le psycologue, ce n'était peut-etre pas pour rien... Artémis choisit de lui serrer la main, et de faire comme s'il n'avait rien remarqué. Ca serait plus simple.

Artémis Fowl. Oui, ça va...

Euh... Ca faisait pas un peu bizarre de demander si ça allait à un inconnu ?

Si vous attendez pour voir le psy, je crois qu'il va faire une pause de quelques minutes...

Bien sur, il était probable qu'Axel soit là pour le rencontrer, lui, mais si c'était le cas, il n'avait qu'à le dire... Ce n'était pas le probleme d'Artémis, et il n'avait pas pour habitude d'aider les gens.

*Il m'a même pas posé la question. Quel...* *Mal élevé, Axel* *Euh... non... c'est pas ça Henry. Vais le lui dire moi à ce Fowl...* *Axel...* *Leonhard, c'est pas tes affaires* *C'est juste ce qu'on appelle un argument de poids, Axel...* *Camarades ! L'heure est à la révolution. Nous devons nous soulever contre...*
*Toi, va te coucher !* Tiens, là, on était tous d'accord, sauf Yuri. Le pauvre...

Merci, ça va aussi. Quelques minutes vous dites ? Hum, c'est embêtant ça... Et il est...

Je sors sa montre de ma poche et regarde l'heure. Bon... à et demie j'entre... Je range sa montre dans ma poche. Y'aussi son porte-monnaie. N'en ais pas besoin, si ? *Non, pas vraiment* *Alejandro, c'est quoi ce sentiment de... culpabilité ?* *C'est sûr, c'est pas toi, Axel, qui comprendra ce genre ce chose* Henry, arrête de bailler dans ma tête quand tu parles, c'est assez douloureux. *Sorry Charles* *Ma... vous pourriez parler dans une langue compréhensible ?* *Les pensées ne parlent pas, Francesco.* *Bon, alors penser une langue compréhensible te conviendrait-il mieux Axel ?* *Dites... il le fait exprès ?* J'en sais rien, moi... *Moi non plus* *Bon, alors... Primo, arrête de jouer les malins en prenant tes airs de... Et deuxio, s'il n'y a pas de parole.... Il n'y a pas de langues...* *Aaaahhhh. Et comment ça se fait qu'on parle entre nous là, alors...* Mais. On pense ! Francesco. On pense ! p-e-n-s-e.* Laisse tomber: il est Italien. *Camarades, je dois m'insurger contre cette discrimination qui...* *Toi, tais-toi !* On a beau dire, le socialisme russe fait très facilement l'unanimité... contre lui. Je sors le porte-monnaie de ma poche et le tend à sieur Fowl.

Je crois que c'est à vous. L'ai trouvé dans... *tousse*ma poche.

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Axel semblait pressé. Il tira une montre de sa poche pour regarder l'heure. Si Artémis porta plus d'attention que nécessaire à ce geste, ce fut surtout parce qu'il paraissait assez inhabituel. En général, quand on à une montre, on l'attache à son poignet, on ne la cache pas dans sa poche. C'est en se faisant cette reflexion qu'Artémis remarqua que la montre en question ressemblait beaucoup à la sienne. Discrètement, juste pour vérifier qu'il ne s'était pas trompé, il tâta son poignet gauche, espérant y sentir le contact de la montre... Mais ses doigts ne touchèrent que sa peau.

Vous disiez ? Quelle heure est-il ? Parce qu'il semble que ma montre ait... disparu... Mais peut-être que vous le saviez déjà...

Ben voyons... Là, il était en train de lui rendre son porte-monnaie. Pas vraiment le genre de personne en qui on pouvait avoir confiance... Sans blague...
Artémis resta impassible.

Comme c'est gentil à vous ! dit-il d'un air faussement enjoué.
Dans votre poche... Quel hasard... Je suppose que vous savez ce qu'il faisait là-dedans...

N'empêche, Artémis se sentait un peu humilié sur les bords... Il avait beau garder ses grands airs... On venait quand même de lui piquer sa montre et son porte-monnaie sous ses yeux, sans qu'il ne s'aperçoive de rien ! Son ego surdimensionné de génie s'en trouvait légèrement blessé... Ca commençait mal pour ce cher Axel... Il était en train de se mettre à dos le célèbre Artémis Fowl...
Par reflexe, il tata le porte-monnaire qu'Axel venait de lui rendre, pour vérifier si son contenu y était toujours...

Ne vous inquiétez pas, tout est dedans. Y compris vos huit cent trente-deux euros, votre carte d'identité, et le localisateur GPS installé discrètement dans la doublurez par votre cher garde du corps, probablement à votre insu puisqu'il n'y a plus de piles, ce dont je doute que ce serait le cas si vous étiez l'auteur de ceci.

Il risque vraiment de ne pas m'aimer, mais alors pas du tout. Heureusement, lui ais pas sorti les tours de magie, il m'aurait pris pour un fou illuminé....

J'imagine qu'il devait s'ennuyer dans votre poche, et que donc il est venu dans la mienne. C'est tellement solitaire ces pauvres petites bêtes... Si je sais où est passée votre montre ? c'est celle-ci ?

Je lui tend une Swatch en plastique multicolore, "trouvée" en cours d'italien. Ma pauvre voisine...*Je ne dirais pas qu'on se moque un peu de lui, mais...* *Non, quelle idée Alejandro ? Voyons... *

Enfin, cessons ces enfantillages... J'ai récemment cru comprendre que vous aviez rencontré un certains monsieur Lithium... Ce doit être une connaissance commune, chez qui j'ai toujours voulu "rendre visite". Je n'en ais malheureusement actuellement pas les moyens technologiques ni financiers, et je m'étais dit que vous pourriez peut-être être vous aussi intéressé par le matériel détenu chez cet... "ami". Sachant que je suis à la base un cambrioleur professionnel de formation... C'est de famille, depuis quatre générations...

Le psychologue ouvre la porte, j'entre sans un regard en arrière.

Ma "carte de visite" est dans votre poche si jamais ça devait vous intéresser. Bonne journée mister Fowl.

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Ce garçon était profondément vexant... Non mais vraiment... A quoi cela servait-il qu'Artémis prenne toutes ces précautions, si c'était pour qu'on puisse lui piquer ses affaires le plus simplement du monde ?
Mais il était un peu surprenant aussi, il fallait l'avouer.
Il devait surtout bien connaitre son "metier" et tout ce qui s'y rapprochait... Surtout pour réussir à détecter la présence de ce soi-disant localisateur GPS, ainsi que son absence de pile... Artémis vérifierait ses dires plus tard. Ce serait aussi l'occasion de faire savoir à Butler ce qu'il en pensait.
Il soupira bruyament, devant l'hypotèse de l'ennui du portefeuille. C'était pitoyable. Enfin... Du point de vue d'Artémis. Quand à Alex, peut-etre qu'il se croyait vraiment drole... Vraiment pitoyable...

Artémis fronça un moment les sourcils. Certes, ce type allait chez le psycologue, ce qui pourrait expliquer sa bizarrerie, pour être poli... Mais les propos qu'il avait tenus sur l'histoire de pile, qui prouvait qu'Artémis n'était pas au courant pour le GPS, étaient trop réfléchis pour que l'hypotèse de la folie soit retenue. Donc, il se fichait complètement de lui. Artémis choisit de ne pas s'en formaliser. L'impassibilité avant tout. Artémis ne saurait le but de toute cette manoeuvre qu'un peu plus tard, il le savait.
Il jeta un regard méprisant à la montre en plastique que lui tendait "Alex".

Oui, il attendait de connaitre l'objectif d'Alex, et n'eut pas à attendre longtemps. Le "monsieur Lithium". Artizual, quoi. Peut-être Alex, pourtant bien renseigné, n'avait-il pas connaissance de "l'alliance" précaire certes, mais alliance tout de meme, qu'il
avait avec Artizual. Bon, d'accord, ce n'était pas vraiment une alliance.. C'était plutot une sorte de jeu, où chacun des deux essayait de soutirer le plus possible à l'autre. Bref, ils y trouvaient tous deux du profit.
Et Alex lui proposait de se priver d'une "aide" qui pourrait encore s'avérer utile de nombreuses fois, pour une seule opération ? Hors de question.

Ben voyons. Sa carte de visite dans sa poche. Artémis renonça à vérifier si elle y était bien. Il savait qu'Alex n'avait pas menti. Par contre, il ne lui avait toujours pas rendu sa montre...
Artémis tourna les talons, avant de rejoindre Butler dans le couloirs. Ils se dirigèrent ensuite vers le parking. En montant dans la voiture, Artémis ne put s'empecher de repenser à cette étrange entrevue...

Je n'aurais pas imaginé qu'il était de ce genre. Dans un monde où seul nos intérêts comptent, pourquoi se soucier de ceux des autres ? Les alliances se fond, se défond et se refond sans fin, en fonction de ce que l'on a ou non besoin de l'autre sur le moment.

Mais ça, il semblerait que ce Fowl ne l'ait pas compris. Tant pis. Pour lui. Je connais quelqu'un d'autre qui sera possiblement intéressé. Après tout, c'est tout un nouveau monde qui s'est ouvert à moi, non ?
Si ce n'est pas lui, ce sera quelqu'un d'autre... Nul n'est irremplaçable, n'est-ce pas ? A différents degrés, certes. Une voix me sort de mes pensées. Le psychologue.

Gardner. Gardner ? Vous aviez demander un rendez-vous avec moi, je crois ?
Je... oui. Désolé. Alors, je venais vous voir parce que je suis actuellement en proie à un dédoublement de personnalité. Enfin, non. Un décuplement je dirais, au minimum.
Je... je vois. Bon, c'est déjà bien que vous vous en aperceviez et l'admettiez, mais...

Il continue, je l'écoute. Après tout, je suis là pour ça, non ?

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